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Le fact check de Fanny : Qu'est-ce que l'uranium 235 ?

Extrait de la bande dessinée : « De Kiekeboes : Uranium 235 »

La famille de BD la plus populaire de Flandre – De Kiekeboes – a exploré le monde entier : des lieux exotiques aux profondeurs de l'océan, en passant par l'astéroïde Spih. Mais c'est maintenant au tour de la fille Fanny de prendre l'initiative. Dans la dernière bande dessinée, elle plonge dans le secteur nucléaire. Le titre « Uranium-235 » y fait déjà allusion, mais qu'est-ce que cela signifie réellement ?

© En collaboration avec De Standaard Uitgeverij. Toutes les illustrations et les intrigues leur appartiennent.

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L'uranium en quelques mots

Si vous jetez un coup d’œil au tableau de Mendeleïev, vous trouverez l'élément « uranium » quelque part en bas. Il est représenté par le symbole « U » et son numéro atomique est 92. Il appartient au groupe des éléments découverts relativement tard dans l'histoire : les actinides. L'uranium – comme les autres actinides – est « radioactif ».

Élément naturel

L'uranium est un métal lourd présent à l'état naturel sur Terre. Bien qu'il semble rare, c'est en fait l'un des éléments les plus abondants dans la croûte terrestre. Il est présent partout en petites quantités, dans l'eau, le sol, les aliments et même dans notre corps. Nous trouvons également de l'uranium dans de faibles concentrations dans les océans.

Saviez-vous que l'uranium est 500 fois plus répandu sur Terre que l'or ?

SCK CEN - De Kiekeboes - Uranium-235 (2024)

Variantes d'uranium

Un atome est constitué de trois « éléments » : le proton, le neutron et l'électron. Le proton est relativement lourd et a une charge électrique positive. Le neutron est également relativement lourd, mais il est électriquement neutre. L'électron est quant à lui très léger et a une charge électrique négative. Le nombre de protons dans le noyau atomique détermine le numéro atomique et donc sa place dans le tableau de Mendeleïev. Un atome est électriquement neutre : c'est pourquoi il y a autant d'électrons flottant autour d'un noyau atomique qu'il y a de protons dans le noyau. Les neutrons présents dans le noyau atomique en assurent la stabilité.

Les éléments chimiques ont souvent plusieurs variantes. Ces variantes ont le même nombre de protons et partagent donc les mêmes propriétés chimiques, mais le nombre de neutrons dans leur noyau diffère. Elles ont donc une masse légèrement différente. Dans notre jargon, nous les appelons « isotopes ». 

Ces isotopes sont soit naturels, soit produits par l'homme (par exemple dans des accélérateurs de particules ou des réacteurs nucléaires). Mère Nature a créé pour nous trois isotopes de l'uranium :

  • Uranium-234

    92 électrons
    92 protons
    142 neutrons

  • Uranium-235

    92 électrons
    92 protons
    143 neutrons

  • Uranium-238

    92 électrons
    92 protons
    146 neutrons

SCK CEN - De Kiekeboes - Uranium-235 (2024)

Énergie nucléaire

Les centrales nucléaires produisent de l'électricité en faisant entrer en collision des neutrons avec des atomes d'uranium. Le noyau d'uranium capture ce neutron : ce faisant, le noyau devient instable et se scinde en deux noyaux atomiques plus petits. Au cours de ce processus, deux ou trois neutrons supplémentaires à haute énergie sont émis. Ceux-ci peuvent à leur tour frapper d'autres atomes d'uranium. Le processus se répète ainsi à l'infini, d'où le terme de « réaction en chaîne ». 

La fission nucléaire libère de l'énergie. L'énergie libérée est évacuée par le liquide caloporteur dans le réacteur pour générer de la vapeur. Cette vapeur entraîne une turbine, qui est à son tour reliée à un alternateur. C'est l'alternateur qui génère de l'électricité.

Saviez-vous que de l’uranium faiblement enrichi de la taille d’un œuf de poule pèse 1,1 kilogramme ? Avec cette quantité, nous pouvons produire autant d'électricité que 88 tonnes de charbon. La production d'énergie de cet « œuf d'uranium » équivaut à 80,000 « œufs de charbon ».

Enrichissement de l'uranium

Les variantes – les « isotopes », vous vous souvenez ? – de l'uranium ne conviennent pas toutes à la fission. L'uranium 235 se laisse le plus facilement éjecter par un neutron. Il préfère capturer des neutrons lents, mais au fond n'importe quel neutron – lent ou rapide – fait l'affaire. Pour l'uranium 238, il n'en va pas de même : il ne veut « danser » qu'avec des neutrons rapides.

Saviez-vous que l'eau dans les réacteurs nucléaires ralentit les neutrons ?

Cela signifie que nos réacteurs refroidis à l'eau ont besoin d'uranium 235 pour maintenir une réaction en chaîne. Malheureusement, l'uranium naturel est composé à 99,3 % d'uranium 238 et à seulement 0,70 % d'uranium 235.[1] C'est trop peu pour faire fonctionner l'essentiel des réacteurs nucléaires. Nous allons donc augmenter artificiellement la quantité d'uranium 235. Nous qualifions ce processus « d'enrichissement ».

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[1]Et le troisième élément, l'uranium 234 ? Avec 0,0054 %, sa présence est négligeable.

Ce faisant, le pourcentage peut être augmenté jusqu'à...

  • SCK CEN - De Kiekeboes - Uranium-235 (2024)

    moins de 19,75 %

    Uranium faiblement enrichi

    L'uranium enrichi à 19,75 % – ou communément 20 % – entre dans la catégorie de « l'uranium faiblement enrichi ». Les centrales nucléaires comme Doel et Tihange fonctionnent typiquement à un taux d'enrichissement allant jusqu'à 4,5 %. Il s'agit d'une concentration idéale pour que notre type de réacteurs maintienne une réaction en chaîne.

  • SCK CEN - De Kiekeboes - Uranium-235 (2024)

    plus de 20 %

    Uranium hautement enrichi

    L'uranium enrichi à plus de 19,75 % est appelé uranium hautement enrichi. Au niveau mondial, de nombreux efforts sont déployés pour minimiser son utilisation car, au-delà d'un niveau d'enrichissement de 85 %, il pourrait potentiellement entrer dans la composition d'armes nucléaires. Actuellement, une dizaine de réacteurs de recherche fonctionnent encore avec de l'uranium hautement enrichi.

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Un monde plus sûr

Notre réacteur de recherche BR2 fonctionne également avec de l'uranium hautement enrichi depuis les années 1960. Ce choix a été fait lors de la construction afin que le réacteur puisse fournir des performances techniques élevées pour les tests de matériaux et la production de radio-isotopes médicaux. Mais plus pour longtemps ! Nous prévoyons de remplacer notre combustible par une variante faiblement enrichie. Cette conversion est prévue en 2026 sur notre calendrier. Si tout se passe comme prévu, nous entrerons à nouveau dans l'histoire. Le BR2 serait alors le premier réacteur de recherche alimenté par du combustible à haute performance au monde à effectuer cette transition.

Cette conversion est un processus de longue haleine : elle implique des années de développement, des essais intensifs et un dossier de sûreté très détaillé. En effet, nous devons prouver à l'Agence fédérale de contrôle nucléaire (AFCN) – l'autorité de régulation nucléaire en Belgique – que le nouveau type de combustible est aussi sûr que l’actuel. En outre, le réacteur de recherche devra fournir les mêmes performances techniques avec le nouveau combustible. Et ce n'est pas rien : le BR2 est l'un des réacteurs de recherche les plus puissants au monde. Le secteur médical et le secteur scientifique comptent sur lui. En effet, il joue un rôle essentiel au niveau mondial en produisant des radio-isotopes médicaux et en testant de nouveaux matériaux et combustibles pour l'industrie nucléaire.

En 2023, nous avons franchi une étape importante dans ce processus de conversion. Pour la première fois, trois assemblages de combustible d'essai faiblement enrichis – comme leurs camarades hautement enrichis – ont servi de véritable matière fissile pour le réacteur de recherche belge. L'ambassadeur américain Michael M. Adler nous a félicités pour cette étape importante [voire la vidéo]. 

Vous voulez savoir comment ces assemblages de combustible d'essai ont passé le test ? 

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Énergie nucléaire durable

Nos réacteurs nucléaires actuels fonctionnent grâce à la fission de l'uranium 235, et cela ne représente qu'une petite part du gâteau d'uranium naturel. Et si... nous pouvions aussi tirer de l'énergie de l'uranium 238 ? Et si... nous pouvions en d'autres termes également avoir recours à ces 99,3 % dans l'uranium naturel ? Nous pourrions alors obtenir plus d'énergie à partir de la même quantité d'uranium et nous serions plus efficaces dans l'utilisation de nos ressources naturelles. Nous nous attaquons à ce problème – à la demande du gouvernement belge – par la recherche et le développement de notre petit réacteur modulaire (Small Modular Reactor (SMR)) refroidi au plomb.

La fission de l'uranium 238 ne se produit que lorsqu'il entre en collision avec des neutrons rapides. Pour que les neutrons restent rapides, nous devons les faire entrer en collision avec un liquide caloporteur composé d'atomes lourds. Les atomes de l'eau étant « trop légers », nous avons choisi le plomb pour ce réacteur. Le métal liquide permet une utilisation plus efficace des matières premières, mais présente également d'autres avantages. Ce type de réacteur va contribuer à une forme d'énergie nucléaire plus sûre et plus durable.

 Vous voulez en savoir plus sur ces avantages ? 

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SCK CEN - Kiekeboe - Uranium-235 (2024)

Recyclage nucléaire

Notre SMR refroidi au plomb n'utilisera pas seulement les ressources de manière plus efficace. Grâce à son fonctionnement avec des neutrons rapides, le réacteur aura en outre le potentiel de fonctionner en cycle du combustible nucléaire fermé, et ainsi d'utiliser le MOX comme combustible. Le MOX ou mélange d'oxyde est constitué d'oxyde d'uranium et de plutonium. Il peut être issu du recyclage du combustible usé de nos centrales actuelles d'une part ou, à l'avenir, du recyclage de notre propre matière fissile. Nous pouvons recycler jusqu'à 96 % du combustible usé ! Cela pourrait avoir une incidence considérable sur la manière dont nous traitons aujourd'hui les matières fissiles usées provenant de nos centrales nucléaires actuelles.

Vous voulez savoir comment c'est possible ? 

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